C’est sans doute l’événement musical du début de la saison d’Été à Châteauvallon scène nationale.
L’ensemble corse A Filetta posera ses valises pour une soirée sous les étoiles le vendredi 14 juin à 22h
Pourquoi est-ce important de voir et écouter ce concert ?
De tous les groupes insulaires c’est sans doute le plus authentique et le plus ouvert aux influences extérieures de la world Musique. Il fait l’unanimité dans les milieux musicaux les plus exigeants. Son nom est inspiré de l’expression corse « Ùn ti scurdà di a filetta ! » se traduisant par « n’oublie pas la fougère ! » qui signifie « n’oublie pas d’où tu viens ». La particularité de la fougère réside dans sa capacité à semer ses graines de par sa structure.
Le groupe initial a environ quarante ans d’existence, et des dizaines de chanteurs ont fait partie de l’ensemble dont Michel Frassati, Dédé Nobili, Paul-Félix Nasica, Pierre Bertoni, François Croce, Maxime Merlandi, Stéphane Casalta, Antoine Mariotti, José Filippi. Tous sont des initiateurs du renouveau du chant polyphonique corse.
Le groupe continue de collaborer avec Jean Antonelli, Yves Leccia, Tumasgiu di Grisgione, Jean-Marc Pellegri, Éric Fino. Au début de l’été 2013, la composition de l’ensemble est modifiée par le départ de Jean-Luc Geronimi, membre du groupe depuis dix-sept ans, et de Ceccé Acquaviva, remplacés par deux nouveaux chanteurs exceptionnels : François Aragni, ancien membre du groupe Vitalba, et Stéphane Serra, ancien membre des groupes Alba, Giramondu et Aghja Rossa. Je cite tous ces noms d’artistes car on ne dira jamais assez combien cet art musical (unique en Europe) doit à ses découvreurs. Ah si toutes les régions de France ressemblaient musicalement à la Corse ! Combien de pseudos folklores mondialisés et standardisés nous aurions évités ! Seule la Corse a su renouer sérieusement avec sa tradition musicale dépassant la « carte postale »des chanteurs corses de complaisance.
Un esprit d’ouverture.
Le secret du « revival » de la musique corse c’est donc d’avoir compris que pour rendre vivant une tradition il faut la métisser sans inquiétudes. Ainsi en 2006 le groupe rencontre les musiciens italiens Paolo Fresu et Daniele di Bonaventura. Un coup de foudre réciproque qui prit la forme d’un premier album, Mistico mediterraneo, et d’un second, Danse mémoire, danse, récompensé par l’Académie Charles Cros. Autour des six chanteurs corses, Paolo Fresu à la trompette et au bugle et Daniele di
Bonaventura au bandonéon, font dialoguer Aimé Césaire et Jean Nicoli par-delà les mots. Ces textes tout en insistant sur l’enracinement insistent sur l’universalité. Je pense à la belle idée de Jean Jaurès vantant les mérites d’un nationalisme humaniste « Dans l’inconscient collectif les racines profondes des divers peuples se rencontrent mieux ! Beaucoup de nationalisme chauvin éloigne, un peu de nationalisme culturel authentique rapproche ! » » C’est lorsque les autres sont profondéments eux-mêmes qu’ils se retrouvent unis dans l’altérité dépassée. Jean Claude Acquaviva leader du groupe précise également dans ce sens: « La musique, la voix, mettent en relief les idéaux mais aussi les rêves de ces princes des nuées à travers une musique métissée sans frontières. De Fort-de-France au Mali, en passant par la Corse, les polyphonistes et jazzmen se réapproprient leur philosophie de vie, de révolte et de refus de l’injustice en les donnant en partage. »
Pour le concert exceptionnel du vendredi 14 juin à 22h dans le grand Amphithéâtre Komatis A Filetta sera composé de Jean-Claude Acquaviva, François Aragni, Petru-Anto Casta, Paul Giansily, Stephane Serra, Jean Sicurani et Maxime Vuillamier. Interviendront aussi deux virtuoses italiens, Paolo Fresu Trompette et bugle, Daniele Di Bonaventura Bandonéon.
Jean-François Principiano
