Pourquoi vouloir changer de sexe ? Pourquoi se sentir prisonnier d’une assignation sexuelle? Peut-on choisir son sexe ? Non ? Oui ? Et pourquoi pas ! Les vieilles théories sur la transidentité sont en train de voler en éclats. Et le renouveau de la pensée « trans » n’est pas sans rappeler certains combats féministes. Disposer de son corps, par exemple, ou construire son identité : féminine, masculine, voire au-delà des catégories binaires.
Un nouvel horizon intérieur
Le fait, pour un homme ou pour une femme, de ne pas se reconnaître dans son sexe d’origine, et la volonté d’être reconnu(e) dans le sexe opposé, n’est plus considéré comme une maladie. Se dessine alors un nouvel horizon intellectuel dans lequel les personnes « trans » ne seraient plus soumises au pouvoir médical, mais deviendraient acteurs et actrices de leur propre devenir. C’est ce que propose Françoise Sironi dans son splendide ouvrage intitulé Psychologie(s) des transsexuels et des transgenres. Mais c’est aussi ce qu’illustre ce beau spectacle-témoignage qui a ému tout Avignon l’an dernier.
La théâtralisation du refus du sexe assigné.
Après un travail remarquable et émouvant sur la prison, Trans (més enllà) est donc le second volet d’un diptyque consacré aux êtres enfermés dans un corps étranger qui rejettent l’identité de genre assignée. Là encore, la pièce est conçue par Didier Ruiz comme une série de séquences donnant la parole a sept témoins. Au festival d’Avignon In, ce spectacle a labouré les consciences des publics. Châteauvallon, scène nationale le propose pour deux soirées exceptionnelles les 1 et 2 février à 20h 30. Il faut le voir.
Un théâtre profondément humain.
Sur scène sont convoqués des êtres porteurs de leur mémoire, de leur vécu et de leurs expériences intimes. Là encore, la Compagnie des Hommes défend un théâtre de l’humanité qui œuvre au rapprochement de personnes éloignées, interroge les clivages et démonte les clichés qui ont la vie dure. Sur la scène nue mais habillée de lumière, la parole de ceux et celles que Didier Ruiz a rencontrés se libère, en catalan ou en espagnol, ou en français pour raconter leur transformation, l’accompagnement de leurs proches ou leur éloignement, l’amour ou le désamour… Justesse de ton, respect de l’autre, humilité, empathie : Didier Ruiz et son complice Tomeo Vergés, chorégraphe, plongent le spectateur « dans une écoute démultipliée. » Une attention complice qui touche et bouleverse sans cesser d’être un événement théâtral.
Avec Neus Asencio, Clara Palau, Daniel Ranieri del Hoyo, Raül Roca Baujardon, Ian de la Rosa, Sandra Soro Mateos, Leyre Tarrason Corominas.
Châteavallon 795 Chemin de Châteauvallon CS 10118 – 83192 Ollioules Informations – 04 94 22 02 02
Un prolongement cinématographique
Notons enfin que L’un vers l’autre le film réalisé par Stéphane Mercurio sur la création de Trans (més enllà) sera diffusé sur France 3 dans l’émission de court métrage Libre Court, le vendredi 29 mars en 3ème partie de soirée vers 0h30
Jean-François Principiano