Toulon : PONTCARRAL ou 25 ans de laisser se faire

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crédit photo sur X Mémoire2Ville

PONTCARRAL ou 25 ans de laisser se faire une copropriété en logements sociaux de fait
Notre gazette départementale nous fait un focus sur le dernier Conseil municipal de Toulon ou fut débattu le PLH et aux questions de Magali Brunel (opposition) furent apportées des réponses sous forme de questions de la part de l’adjoint à l’urbanisme a priori par ailleurs peu informé de l’historique de l’anru centre ancien de Toulon, en répondant : « je rappelle que la ville n’intervient pas dans ce type de processus de préemption et de rachat…. »
J’ai mémoire que tel n’était pas le cas pour le centre ancien puisque les préemptions, rachat …puis revente à des opérateurs furent à la base du lancement de cette opération….j’en sais quelque chose pour avoir été l’un de ces opérateurs (très modeste) !

Les réponses à ces questions doivent nous faire remonter aux années 2005 (pour moi) et bien avant pour être plus exhaustif.
Dans le cadre de ma profession, je suis arrivé sur la région, dont Toulon en 1995 (annus horribilis pour une longue période politique toulonnaise, précédée d’autres qui ne peuvent se dédouaner de cet aboutissement !) ; comme beaucoup je déplorais ces barres d’une entrée de ville peu engageante dont je pensais que c’était des logements sociaux de la « belle époque 1960 », mais dont j’appris que c’était une copropriété très compliquée…et là je retombais dans mon métier et mes préoccupations, à savoir les copropriétés dégradées par suite de l’insolvabilité croissante des copropriétaires (crise pétrolières successives en particulier..)ne pouvant faire face aux travaux d’entretien.
Animant par la suite(2005) une association pour le logement avec des financements solidaires qui s’implantait dans le Var je fus contacté par la Mairie de Toulon pour envisager d’acquérir 5 logements qui étaient à vendre à « vil prix », vendus par des propriétaires devenus impécunieux et ne pouvant assumer des charges locatives de plus en plus élevées (moins on entretien plus le rattrapage coute cher). Cette proposition me parut curieuse et m’amena à approfondir la question.

Les conditions de Pontcarral après prise de connaissance de la réalité firent refuser cette « offre », de plus cela revenait à profiter de la faiblesse des vendeurs ce qui ne correspondait pas à l’esprit qui guidait l’action de l’association. Impliqué alors dans l’ANRU du centre ancien je me désintéressais quelque peu de Pontcarral…en suggérant que vu le prix il me semblait qu’une préemption par la Commune ou l’État et la participation d’un bailleur social reconnu (je pensais à ThM ou Var Habitat) permettrais de faire entrer des professionnels et sans doute développer du logement social salvateur, dans le cadre d’une vraie politique de long terme, puisque la situation en l’état ne pouvait que se détériorer. Qu’il me soit permis de penser que l’attention tant de la Ville que de l’État était concentrée sur le centre ancien avec des budgets conséquents, ne permettant pas d’accorder de l’attention au millier de personnes de Pontcarral qui s’enfonçaient dans la précarité !!!

Dans la continuité de mes engagements de retraité retraitant sa vie, je renforçais ma participation au sein d’une Fondation reconnue pour son action pour le logement des défavorisés, laquelle commençait à travailler et mobiliser sur cette thématique des copropriétés dégradées. Bien sur la région parisienne et Marseille servaient de champs d’action; Toulon avec Pontcarral s’immisça dans le dossier avec quelques propriétaires occupants qui relatèrent leurs difficultés. Ceci permis a cette Fondation de co financer une action auprès des habitants, en partenariat avec la Ville de Toulon (CUCS) et la Région.
Cet engagement de la Fondation avait aussi pour objet de tenter de mobiliser les vrais acteurs, à savoir la Ville et l’État…sauf qu’au bout de 3 ans rien ne se passant, ces subventions n’apportaient pas de plus- value au projet d’autant que la situation devenait de plus en plus compliqué : communautarisme, marchands de sommeil, trafics de stups…la subvention n’avait plus lieu d’être. Ce n’était pas faute d’avoir rencontré les préfets successifs, les services de l’État, la Commune…

Quand aux syndics dont l’un était un ancien collègue …les pauvres qu’allaient -ils faire dans cette galère ?!! ils arrivaient péniblement à dégager des fonds pour pouvoir se rémunérer…alors payer les fournisseurs et travaux indispensables !!! à l’impossible nul n’est tenu.
Bien sur des mots, des visites, des rendez- vous…mais pas de véritable politique concertée , et la situation ne faisait qu’empirer avec la prise en main de réseaux investissant sur la misère, rachetant les logements à vil prix et exploitant des locataires captifs faute d’autres solutions par suite du manque criant d’offre de logements sociaux à Toulon et la Métropole ; en transformant des logements (comment faire 3 logements avec un T5)…nonobstant le développement des trafics avec une insécurité galopante, les 2 thématiques étant souvent liées et portées à partir de Marseille…ou d’autres contrées plus méridionales !! Bien sur ces « financiers » bénéficient de la solvabilisation des locataires via les APL…la collectivité, de fait finance les exploiteurs…pas belle la vie ?!
Alors revenons aux réponses sous forme de question de Monsieur l’Adjoint : « Mais alors que pourrait faire l’EPF Paca (bras armée de la commune pour des opérations de portage ) pour le compte d’un bailleur social, si un copropriétaire vendait son unique logement ? le racheter ? Mais pour quoi faire au juste ?

En voilà une question qu’elle est bonne (dixit Coluche) Une idée, comme ça…et si ça restait un logement , un logement social dont le propriétaire vendeur impécunieux resterait locataire, en percevant un petit pécule lui permettant de se redresser, et solvabilisé alors par les diverses allocations …APL…tout ceci dans un processus de requalification financière, technique …et sécuritaire
En 25 ans il eut été possible de bloquer le processus de paupérisation et de gangstérisation ; et lorsque l’on veut bien analyser les couts induits par cet abandon, s’aurait été un véritable investissement pour la collectivité et non du fonctionnement à fonds perdus. Et oui tout se tient et c’est pourquoi seule une action concertée, volontariste voire coercitive vis-à-vis des délinquants de tous poils est impérative.
Alors il est vrai que depuis 4 ans je ne connais plus de Pontcarral que les articles de la presse ou TV relatant les divers trafics, règlements de comptes…les quelques relations qui voulaient s’impliquer ont été réduites au silence et je comprends leur position…la vie est précieuse !

Mais surtout je n’accepte pas d’entendre de la part de ceux qui ont le pouvoir de faire ; que pouvons- nous faire ? Quand on veut, on peut …ou alors on ne s’engage pas en politique en prônant l’intérêt des populations ! Alors une autre réponse souvent entendue : « il s’agit d’une copropriété privée et l’on ne peut intervenir »
Comme si la puissance publique avait pour habitude de se laisser bloquer par ces difficultés ; justement dans le cadre des PLU et autres règlementations, la préemption existe et même l’expropriation pour intérêt général…ce qui fut fait lors de l’anru centre ancien. Ce sont bien sur des procédures qui augmentent les délais et couts de réalisation, mais elles existent …pas pour PONTCARRAL ?
Jean-Paul Jambon

1 COMMENT

  1. Merci à Jean-Paul Jambon pour cette mise au point courageuse autant que pertinente de la part de ce militant de toujours, très actif pour la cause des mal-logés, des sans-abri, des expulsés et du logement social, dans un contexte très défavorable, où le pouvoir veut criminaliser les locataires menacés d’expulsion sans relogement…
    Sa connaissance du cas « Pontcaral » illustre combien la ville de Toulon a fermé les yeux pendant des décennies sur l’état de délabrement permanent qui lui commandait d’intervenir car la sécurité des habitants était sérieusement menacée, sans parler de l’entretien courant qui relevait des syndics et des co-propriétaires. Tous les gestionnaires politiques de la ville ont failli. Il serait temps de s’y mettre.

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