
Jeudi dernier, devant un jury présidé par Mme Eva Mouial-Bassilana, Université de Nice, accompagnée de Thierry Granier directeur de thèse Université d’Aix en Provence, Bastien Brignon directeur de thése Université d’Aix et Caroline Coupet professeur de Droit des entreprises Université de Montpellier, Kristina Rasolonoromalaza professeur à l’IUT de Marseille a soutenu une thèse très originale sur l’Économie sociale et solidaire
L’économie sociale et solidaire
Mêlant le sens personnel de sa démarche et les développements de sa problématique, Kristina Rasolonoromalaza présenta avec clarté sa vision de ce vaste mouvement, lui permettant de suggérer quelques réformes juridiques. Elle a rappelé que « l’économie sociale et solidaire (ESS) désigne un ensemble d’entreprises organisées sous différentes formes statutaires : les coopératives, les mutuelles, les associations, les fondations et les sociétés commerciales de l’ESS. » Cette forme d’entreprise est en progression au cœur d’une société capitaliste libérale qui commence à montrer ses limites. Ces entreprises cherchent à concilier activité économique et l’utilité sociale, avec pour ambition de créer des emplois et de développer une plus grande cohésion sociale. Comment le droit peut il faciliter leur développement ? Nous sommes au cœur des grandes interrogations sociétales.
Un nouveau regard sur les entreprises
Engagées dans leur manière de produire et de consommer, elles offrent de nouvelles possibilités d’entreprendre. Elles adoptent des modes de gestion démocratiques (plus ou moins) et participatifs. Leur motivation économique est d’abord consacré à l’humain, Elles poursuivent donc des objectifs sociaux, tout en favorisant le développement local à travers la création de richesse (activité, emploi, lien social).
Elles allient performance économique durable, impact environnemental, développement de l’emploi, lien social et rayonnement territorial. Comme le soulignait le professeur Thierry Granier lors des rencontres post-soutenance : « En plaçant l’humain au cœur de son activité, l’ESS est porteuse d’un véritable projet de société, positif pour l’emploi et le développement des territoires. » Elle représente environ : 10.5% de l’emploi français, 13.9% de l’emploi privé, 2.37 millions de salariés 221 325 établissements.
En conclusion la doctorante indiqua quelques pistes de réformes pour améliorer les fondements juridiques de cette économie : favoriser la création d’un label européen (mais certains des acteurs le refusent), améliorer l’impact social, définir des normes et règles nouvelles, créer un fond social européen.
Les questions du jury
Je dois dire que la série traditionnelle des questions-réponses avec les membres du jury a été aussi intéressante que la thèse en elle même. Après quelques critiques formelles, Mme la présidente du jury Eva Mouial-Bassilana a souligné la difficulté d’un tel sujet au sein d’une économie majoritairement marquée par l’esprit de lucre des entreprises soumises à la loi d’airain de la concurrence et du profit. De son côté Caroline Coupet de l’université de Montpellier a posé la question fondamentale « Pourquoi le droit devrait-il s’intéresser au financement de l’ESS ? Pourquoi légiférer ? » La doctorante a répondu largement sur le cadre juridique évoquant la loi Hamon de 1974. Elle a rappelé l’idée d’une économie basée sur l’intérêt général, sur les stimulations des déductions fiscales. « Combien serait-il nécessaire d’intégrer maintenant la créativité, la solidarité, avec l’efficacité et la viabilité ? »
Après une rapide délibération dans la belle salle des actes de la Faculté de Droit d’Aix en Provence, Kristina Rasolonoromalaza a été reçue Docteur en Droit avec autorisation de publier sa thèse en l’état. Tout se termina dans une conviviale collation de gâteaux familiaux honorant la Réunion et la grande île de Madagascar. Un modèle de soutenance de thèse alliant la qualité du jury, la recherche originale de la doctorante (5ans de travail !) autant que la pertinence très actuelle du fond débattu.
Jean François Principiano
Loi Hamon 2014